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Without you I'm nothing
3 juillet 2005

moins que zero ...

j'ai enfin fini ce bouquin , "Moins que zero" , de Bret Easton Ellis ... c'est trop con , je l'ai commencé y a au moins 2 mois mais je l'ai zappé pour lire d'autres truc alors qu'il me restait une dizaine de pages seulement ...
globalement, j'en retire une bonne impression ...

Los Angeles dans les années 80 , Clay revient chez lui apres 4 mois dans le New Hampshire pour 1 mois de vacances et retrouve ses potes et sa famille . ils sont jeunes, riches, ils se droguent, certains se prostituent et tous couchent à droite à gauche, d'autres meurent derrière une maison, violent des filles de 12 ans auparavant défoncées ... tout ça dans l'indifference générale . les parents sont quasi inexistants sauf quand il s'agit de fric ou de ragots , les enfants ne voient pas le mal .
L'ecriture est assez speciale : phrases courtes , qui s'enchaînent souvent mal , parfois coupées , des passages retrospectifs regulierement qui permettent de mieux comprendre ce qui a amené le narrateur au stade de l'histoire , des dialogues dont on peu avoir du mal à cerner le sens et surtout la construction ... en bref : l'auteur a écrit son roman à l'image de l'histoire qu'il raconte ... c'est decousu , parfois de comprehension difficile , bizare ...

  Les gens ont peur de se retrouver sur les autoroutes de Los Angeles. C'est la premiere chose que j'entends quand je reviens en ville. Blair vient me chercher à l'aéroport de L.A. et marmonne ça pendant que sa voiture gravit la rampe d'accès. Elle dit : " Les gens ont peur de se retrouver sur les autoroutes de Los Angeles." Cette phrase ne devrait pas m'ennuyer, mais elle s'incruste désagréablement dans mon esprit. Plus rien ne semble important. Ni que j'ai dix-huit ans, que nous soyons en décembre et que le vol ait été plutôt pénible, avec ce couple de Santa Barbara assis en face de moi en première classe et qui a passé son temps à se saouler. Ni la boue qui, plus tôt dans la journée, devant un aéroport du New Hampshire, a eclaboussé le bas de mes jeans, brusquement froids et collants. Ni la tache sur le bras de ma chemise humide et frippée, qui ce matin était propre et repassée de frais. Ni la déchirure au col de ma veste grise à carreaux qui me paraît vaguement plus " côte Est que ce matin, surtout en comparaison des jeans serrés de Blair et de son t-shirt bleu pâle. Tout cela semble s'effriter sous l'impact de cette seule phrase. Je crois plus facile d'entendre que les gens ont peur de se retrouver sur les routes que " Je suis sure que Muriel est anorexique " ,  ou le chanteur à la radio qui hurle à propos des ondes magnétiques. Rien d'autre ne m'importe que ces treize mots. Ni le vent chaud qui me paraît propulser la voiture sur l'asphalte vide, ni la vague odeur de marijuana qui impregne encore faiblement la voiture de Blair. La situation se résume à ceci : je suis un garcon qui rentre chez lui pour un mois, je viens de retrouver une fille que je n'ai pas vue deuis quatre mois, les gens ont peur de se retrouver.

[ ... ]

   Le lendemain, en descente de coke, avec le nez qui pisse le sang, je suis assis dans le cabinet de mon psychiatre. Il porte un chandail à col en V avec rien en dessous et un jean. Je fond en larmes. Il me regarde en tripotant la chaine d'or sur son coup bronzé. J'arrête de pleurer une minute, il me regarde encore puis griffone quelque chose sur son bloc-notes. Il me pose une question. Je lui dis que je ne sais pas ce qui cloche; que ça a peut-être à voir avec mes parents mais j'en suis pas sûr ou alors avec mes amis, que parfois je me perds en voiture; que c'est peut-être la drogue.
   " Au moins, vous êtes conscient de tout cela. Mais ce n'est pas ce que je veux vous dire, non , ce n'est pas ce que je vous demande, pas vraiment "
   Il se lève, traverse la pièce pour redresser une couverture encadrée de
Rolling Stone
figurant Elvis Costello avec ces mots " Elvis Costello se repent" en grosse lettres blanches. J'attend qu'il me pose sa question.
   " Vous l'aimez ? Vous l'avec déjà vu en concert ? Oui ? En ce moment il est en Europe, je crois. C'est du moins ce qu'ils ont dit à MTV. Vous aimez son dernier disque ? "
   " Et moi alors ? "
   " Comment ça ? "
   " Et moi alors ? "
   " Ca va aller "
   " J'en sais rien " , je dis. " Je crois pas que ça va aller. "
   " Parlons d'autre chose. "
   " Et moi alors ? ", je crie en m'étouffant.
   " Allez Clay " , dit le psychiatre. " Ne soyez pas si ... égocentrique. "

[ ... ]

   Je sort de la chambre.
   Rip me suit.
   " Pourquoi, Rip ? "
   Rip semble troublé. " Pourquoi ça ? Tu veux dire c'qui s'passe dans la chambre ? "
   J'essaie d'acquiescer.
   " Pourquoi pas ? On a le droit de se marrer, non ? "
   " Bon Dieu, Rip, elle a onze ans. "
   " Douze ", rectifie Rip.
   " Ouais, douze " , je dis en pensant à ça quelques secondes.
   " Hé, me regarde pas comme si j'étais un vieux vicelard ou un pervers sexuel. C'est pas mon genre "
   " C'est ... " je ne reussis pas à continuer.
   " C'est quoi ? " veut savoir Rip.
   " C'est ... je crois pas qu'on ait le droit. "
   " Le droit ? Quand on veut quelque chose, on a le droit de le prendre. Quand on veut faire quelque chose, on a le droit de le faire . "
   Je m'adosse au mur. J'entend Spin gémir dans la chambre, et puis le bruit mat d'une claque, peut être une gifle.
   " Mais tu n'as besoin de rien. Tu as déjà tout " , je lui dis.
   Rip me regarde. " Non, je n'ai pas tout. "
   "Quoi ? "
   " Non , je n'ai pas tout. "
   Après un silence, je lui demande " Et merde, Rip, qu'est ce que t'as pas ? "
   " J'ai pas quelque chose à perdre "

[ ... ]

  Quand j'étais à Los Angeles, il y avait un morceau que j'entendais et qui etait joué par un groupe local. Ce morceau s'appellait : " Los Angeles " , les paroles et les images étaient si dures et amères que cette chanson ne m'a pas quitté pendant plusieurs jours. Ces images, je l'appris par la suite, étaient srtictement personelles; aucun de mes amis ne les partageait. Des images de gens que la vie dans la cités rendait fous. Des images de parents si affamés et si frustrés qu'ils dévoraient leur propres enfants. Des images de garçons et de filles de mon âge, dont les yeux quittaient l'asphalte pour être aveuglés par le soleil. Des images qui m'accompagnèrent même quand j'eus quitté L.A. Des images si violentes et perverses que pendant très longtemps elles me semblèrent être mon seul point de repère.

Il s'agit du premier paragraphe, d'un autre qui montre bien l'indifférence des adultes face à la situations des jeunes, de celui du viol de la fillette de 12 ans qui, lui, traduit la vision du monde des jeunes, et du paragraphe final du livre ...
Tout au long de l'histoire, le narrateur évolue et tend de plus en plus à rejeter le comportement de ses amis , il ressent un malaise qu'il n'arrive pas à comprendre puisque tout paraît normal aux autres.
On a l'impression que les personnages flottent dans leur vie isolée sans en comprendre le sens , ils s'ennuient et par conséquent font ce qui leur passe pas la tête sans chercher plus loin , sans aucunes limites non plus. Ils ne connaissent rien du monde extérieur et tout leur est égal , ils ne se rendent pas compte non plus des conséquences de leurs actes puisqu'ils n'ont pas à les assumer et recherchent uniquement le plaisir immédiat, qui apparaît souvent comme fictif ( cf drogues ) . La sécurité que l'argent leur procure supprime la necessité d'étudier ( ils se font renvoyer mais sont automatiquement accepter ailleurs à cause de l'argent et de l'influence des parents ) .
Le narrateur est attachant par son rejet instinctif de cette attitude... lui aussi se laisse porter par les evennements et  par ses envies, d'autant plus qu'il est souvent defoncé, mais chez lui une conscience morale omniprésente lui fait prendre conscience de l'existence du bien mais surtout du mal, de qu'ils ont le droit ou non de faire ... il jete un regard critique sur ce qui l'entoure , le comportement de ses amis ou de sa famille (en particulier ses soeurs) , des inconnus ...
Ce qui "fait" le roman et donne envie de le lire jusqu'au bout, c'est l'impression que Clay est face à un choix decisif : celui d'accepter la vie que son entourage lui propose , bercée par la drogue et dominée par la facilité, ou bien abandonner completement cette vie pour se tourner un monde plus "reel" mais aussi plus compliqué et plus réglementé ... ce choix est symbolisé par un autre: celui , à la fin de ce mois de vacances, de retourner à la fac dans le New Hampshire, ou de rester chez lui à L.A.

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Commentaires
P
Ce bouquin m'a l'air fort interressant surtout au niveau du stile de l'auteur qui semble se mélanger avec l'histoire pour donner, merveilleusement, un gout bizare.<br /> Dans le même genre tu as Marcel Proust sauf que ses phrases font une page chacunes et les articles du nouvel Obs sur Sarkasy qui emploi ce genre de style (dsl j'ai pas une super culture littéraire encore).<br /> Un livre qui donne envi
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